Le musée de la SFODF
Le musée a pour vocation l’archivage, la conservation et l’exposition de ce qui constitue les moyens des thérapeutiques orthodontiques, depuis l’apparition des premiers dispositifs (18e siècle) jusqu’à nos jours.
Les appareils présentés sont très divers. Aucun appareil n’a réellement remplacé l’autre mais s’y est ajouté, d’où la grande diversité des systèmes exposés dans ce musée et l’imprécision des indications de certains d’entre eux.
Le musée est un espace aménagé au sein de la Société Française d’Orthopédie Dento-Faciale, au 15 rue du Louvre dans le 1er arrondissement de Paris.
L’un des créateurs en fût François Brunner qui oeuvra en collaboration avec Julien Philippe. Tous deux étaient attachés à l’histoire et à l’évolution de la pensée et des mécaniques orthodontiques.
Nous remercions Laure Grimouille Metreaud et Caroline Delbouis Reynaud pour leurs travaux de photographie, de documentation, de numérisation et de mise en ligne du musée, réalisés en vue de l’obtention de leur diplôme inter-universitaire d’Orthopédie dento-cranio-maxillo-faciale (Université Pierre et Marie Curie, Paris VI).
Nous remercions également Karine Sifany, Françoise Flageul et Jean-Paul Loreille pour leur relecture attentive.
La naissance de l’Orthodontie
Dès l’antiquité, des tentatives de déplacer les dents ont été essayées.
Galien, auteur Romain du 2e siècle, préconisait déjà de limer les dents, ce qui a aussi été très bien expliqué par Abu Al Quasim (940-1013) autour de l’an 1000.
La naissance de l’orthodontie date du début du 18e siècle. Pierre Fauchard (1677-1761), sous le règne de Louis XV, comprend qu’il est possible de déplacer les dents. Il publie sa découverte en 1728 dans le livre « Le Chirurgien-Dentiste ou Traité des dents » présentant douze traitements de « redressement ». C’est le point de départ de l’orthodontie.
Il y sera aussi question de remodelage coronaire : « Si une dent mal située peut être mise au rang des autres à la faveur de quelque espace, on redressera cette dent en la limant autant qu’il sera possible ».
Fauchard trouve ces redressements longs et cherche d’autres moyens plus rapides. Il les trouve dans la luxation des dents. En fait, Fauchard ne s’occupe que des dents les plus visibles. Les premiers appareils sont ligaturés aux dents. Ils ne sont donc pas amovibles. Ces dispositifs ont dominé la pratique orthodontique jusqu’aux environs de 1900.
A la fin du 18e siècle, un anglais, J. Hunter établit qu’on ne peut pas compter sur la croissance naturelle pour donner de la place aux dents qui en manquent, il faut alors enlever une ou deux dents pour pouvoir aligner les autres. Au début du 19e siècle, un conflit oppose partisans et adversaires des extractions.
Puis, en 1841, P.J. Lefoulon préconise l’expansion d’arcade afin d’y positionner toutes les dents, et ce sans extractions. Chez le sujet jeune, « on introduit dans la bouche de l’enfant les deux pouces pour la mâchoire supérieure et, par des tractions ménagées mais fréquentes, nous nous efforçons d’écarter les arcades dentaires ». Les parents sont engagés à faire de même plusieurs fois par jour.
Les appareils amovibles, en métal, en ivoire, puis en vulcanite, se développent à partir de 1840 dès que les praticiens disposent de moulages fidèles. Les systèmes fixés se sont multipliés après la mise à disposition du ciment de scellement en 1871.
A la fin du 19e siècle, les orthodontistes américains soulignent l’importance des rapports entre les arcades dentaires. Trop souvent, l’une est en arrière par rapport à l’autre, ce qui affecte le profil (menton en arrière ou en avant) et nuit à la mastication. Assurer de bonnes relations entre les arcades devient, à côté de l’alignement des dents, le but du traitement orthodontique. On commence à partir de 1860 à vouloir modifier la forme ou la position des bases osseuses, et à concevoir pour cela des appareils intra- ou extra-buccaux.
A la même époque, on commence à penser que les difformités des mâchoires sont en rapport avec des troubles de la croissance générale, dus à une mauvaise hygiène de vie ou à une maladie. Une de ces causes sera confirmée par la suite : si un enfant ne respire pas par le nez, les fosses nasales ne se développent pas et le palais reste étroit.
E.H. Angle crée en 1887 la première école d’orthodontie à Saint-Louis dans le Missouri. Il préconise que l’orthodontie devra être réalisée par des praticiens spécialisés.
Il propose, la même année, une classification des décalages maxillo-mandibulaires mondialement reconnue. La fonction occlusale est, pour E.H. Angle, fondamentale. La denture doit être complète. Il est radicalement opposé aux extractions. S’inspirant de T.W. Evans, E.H. Angle crée en 1889 un appareil orthodontique comportant des bagues avec des tubes vestibulaires soudés, le E-Arch, qui aura un grand avenir. La thérapeutique est alors essentiellement mécaniste et l’orthodontie américaine, soutenue par un tissu industriel et commercial performant, se développe rapidement. Il inventera, à la fin de sa vie, la technique Edgewise.
Ce n’est qu’en 1916 qu’E.H. Angle mit au point le premier bracket (attache), permettant d’exercer un couple de forces. C’est la grande invention du 20e siècle car les dispositifs orthodontiques précédents ne pouvaient provoquer que des versions des dents : le bracket va permettre le déplacement radiculaire, dans toutes les directions.
Cette technique multiattache, les brackets étant alors soudés sur des bagues, va connaître plusieurs évolutions. En 1940, C. Tweed, le plus illustre élève d’E.H. Angle, mit cette innovation mécanique au service d’une doctrine opposée par bien des points. Selon C. Tweed, les fonctions ne modèleraient pas l’os, l’occlusion ne modèlerait pas les mâchoires car les bases osseuses seraient déterminées génétiquement. La pensée de C. Tweed s’est imposée de 1940 à 1990 pour une majorité d’orthodontistes. Mais toutes les mécaniques multibagues conservent les principes de l’Edgewise, rendant ainsi hommage à une grande innovation conceptuelle.